Tempérance,
A toi qui me fis défaut en mes jeunes années,
Toi qui éclatais pourtant de ton absence,
Écartant de moi cette impassible indifférence
Qu’il faut aux cœurs pour s’attacher.
Et les mille traités que je lisais alors,
Cherchant la sagesse, moi le conquistador,
Me remplissaient de plus d’impatience,
D’une ivresse qui m’éloignait de la tendresse
Que de mes vœux tout entiers j’appelais.
Victime de mon intégrité déversée en des flots
bouillonnants,
Je découvrais mes interlocuteurs apeurés et
fuyants !
S’il faut au sage, une bonne pincée d’honnêteté,
C’est à la vérité par son silence qu’il
rayonnait ;
Et si à ma jeunesse je pu m’adresser,
Je dirais à l’impatient que j’étais,
Qu’il y a plus de saveur dans la goutte,
Longuement, longuement attendue,
Que dans la marre de cocagne qui s’offre à toutes les
vues !
Tempérance,
Vertu qui manquait au jeune poète que j’étais,
Méconnaissable tandis que le tout je partageais,
Mer de sable éternellement inconnue,
Moi qui jamais, jamais ne t’ai connu !
H. Seposa
DAUMIER - Poète dans la mansarde. |